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L’essor du SIG à titre de fonction d’entreprise

Les fonctions d’entreprise sont la pierre angulaire d’une organisation. Elles constituent ses atouts les plus précieux, en agissant comme courroie de transmission entre la stratégie et les résultats. Dans bon nombre d’organisations, les SIG (et les sciences géographiques) sont une fonction d’entreprise essentielle, mais ils sont souvent perçus comme une technologie de soutien. Un changement de mentalité s’impose.

Il est généralement admis que le succès des organisations repose principalement sur leur capacité à créer et à gérer des fonctions d’entreprise efficaces. Selon une étude menée par The Economist en 2013, 61 % des cadres supérieurs reconnaissent que leur entreprise peine à mettre en œuvre une stratégie, phénomène attribuable en grande partie à l’échec de la mise en place des fonctions requises. En fait, les organisations affichent un si piètre bilan en la matière que les chances de succès de toute initiative stratégique relèvent purement du hasard.

Pour les non-initiés, une fonction d’entreprise est la capacité collective de s’acquitter convenablement d’une tâche en visant des résultats précis. Les fonctions représentent les éléments qu’une organisation doit être en mesure de réaliser pour remplir sa mission. Ce sont les leviers d’action d’une organisation.

En somme, les fonctions sont des éléments fondamentaux qui incarnent les activités les plus importantes d’une entreprise. Elles sont le lien essentiel entre la vision décrite dans une stratégie et les résultats souhaités par son exécution. De solides fonctions permettent aux stratégies de porter des fruits. À l’opposé, des fonctions lacunaires ou parcellaires entraînent à coup sûr l’échec des stratégies.

En pratique, les fonctions sont une combinaison de compétences, de processus, d’outils et de gouvernance. La combinaison est la clé ici. C’est une chose de compter sur du personnel de qualité et d’excellentes technologies, mais c’en est une autre de générer de la valeur sur une base continue. Les fonctions se trouvent au croisement des compétences et des connaissances, des applications et des données, des processus et des activités, des contrôles et des activités de suivi.

Bien entendu, les fonctions ne sont pas toutes équivalentes.

Certaines d’entre elles sont stratégiques, en ce sens qu’elles procurent un avantage durable. D’autres sont plutôt élémentaires, soit essentiellement les capacités de base. Cela dit, les organisations solides développent des fonctions à tous les niveaux.

Prenons l’exemple d’une administration municipale ayant adopté une stratégie de ville intelligente. Le conseil municipal a reconnu la nécessité de compter sur une plus grande transparence et il veut faire des données ouvertes sa priorité stratégique. La ville a choisi quelques jeux de données initiaux, développé un site de données ouvertes et publié les données.

Tout va bien jusqu’ici. Mais est-ce la fin de l’initiative?

Comment et quand ces données doivent-elles être mises à jour (processus)? Les résidents disposent-ils d’outils en libre-service pour rechercher, cartographier et analyser les données (outils)? Les employés ont-ils les connaissances nécessaires pour répondre aux demandes touchant les anomalies découvertes dans les données (compétences)? Qu’est-ce qui détermine si l’initiative de données ouvertes est réussie ou non (gouvernance)?

Dans cette perspective, les données ouvertes sont bien une fonction d’entreprise. Il faut y prêter une attention particulière.

Le SIG comme fonction d’entreprise

Pour plusieurs organisations, les SIG et les sciences géographiques représentent une expertise importante. Pourtant, ces éléments ne sont bien souvent pas gérés en conséquence.

Même si le SIG est la source de cartographie officielle de l’entreprise, sa plateforme de connaissance en temps réel et un centre de communication essentiel, il est souvent traité comme un simple outil. Et comme tout outil, il peut être l’objet de coupures de budgets et de ressources. Ainsi, une fonction essentielle peut être marginalisée d’un simple trait de stylo.

Le virage numérique change la donne. La réalité numérique révolutionne la façon dont les organisations offrent leurs produits et services et gèrent leurs activités. De plus en plus d’entreprises passent en mode temps réel, en misant sur les données et les systèmes « intelligents ».

L’information est au cœur de cette révolution. Tout particulièrement l’information géospatiale. Et son volume est considérable.

La plupart des éléments qui intéressent une organisation ont un contexte géographique. Les produits sont expédiés à des adresses, les pannes touchent des corridors routiers particuliers et le crime sévit dans des quartiers donnés. Cela signifie que les décisions les plus importantes d’une organisation peuvent être cartographiées, analysées pour y détecter des relations spatiales et communiquées aux personnes concernées.

Cette nouvelle réalité a propulsé le SIG à l’avant-scène. Les exigences sont grandissantes à l’égard de cette technologie et de ceux qui l’utilisent. Pour répondre aux promesses de l’environnement numérique, les organisations doivent intégrer les données géospatiales dans leur ADN.

Revenons à l’exemple de notre administration municipale. Pour soutenir son initiative de ville intelligente, le conseil municipal a reconnu la nécessité d’intégrer le SIG plus directement et plus largement dans ses services et ses activités. Il fallait donc créer une fonction d’entreprise.

Le conseil a mis la priorité sur le développement de compétences dans les sciences des données SIG et la mise sur pied de partenariats avec des établissements d’enseignement, afin de former la prochaine vague de talents (compétences). L’environnement SIG actuel a été migré vers une plateforme SIG web, et ce nouvel environnement a été intégré aux systèmes de gestion des actifs et aux progiciels de gestion intégrée, afin d’activer le SIG au bureau, sur le terrain et dans la communauté (outils). Une méthodologie de livraison de projets agile a été adoptée pour accélérer la livraison des nouvelles solutions aux utilisateurs (processus). Des processus ont été élaborés pour faciliter l’octroi de fonds et l’établissement des priorités touchant les initiatives avec le SIG, et une structure de comité de surveillance officielle a été mise sur pied (gouvernance). La ville a concentré ses efforts sur la création d’une fonction d’entreprise plus apte à soutenir une organisation orientée sur les données géospatiales.

Créer une fonction SIG

Créer une fonction SIG ne se fait pas d’un seul coup. Comme toute transformation, il s’agit d’un processus d’amélioration continue. Cela dit, toute initiative de création d’une fonction devrait tenir compte d’au moins cinq pratiques exemplaires.

  1. Déterminer les fonctions requises. La première étape consiste à déterminer les fonctions SIG qui soutiennent la stratégie de l’organisation. Cela signifie d’examiner les initiatives commerciales prioritaires et les opérations de base, afin de déterminer le sous-ensemble des fonctions requises. Dans certaines organisations, une fonction SIG orientée sur la cartographie de l’entreprise peut suffire. Pour d’autres, un ensemble plus diversifié de fonctions s’impose, y compris le mode temps réel, les analyses géospatiales et les outils d’aide à la décision à distance.
  2. Distinguer les fonctions communes et spécialisées. Dans la plupart des organisations, les besoins en matière de SIG diffèrent d’un service à l’autre. Toutefois, il existe souvent des fonctions courantes ou partagées. Il est important de distinguer les fonctions communes de celles qui sont plus spécialisées. Dans notre exemple d’administration municipale, une majorité de services peuvent avoir des besoins communs en matière de cartographie de l’entreprise. Il serait donc pertinent de créer un centre de cartographie pour l’ensemble de l’organisation. Par contre, l’analyse géographique peut différer grandement d’un service à l’autre. Pensez aux domaines de l’application de la loi et du développement économique, par exemple. Les outils, les processus et les compétences ne sont pas les mêmes pour analyser des schémas criminels que pour trouver des zones d’incitation à l’investissement.
  3. Concevoir des fonctions complètes. Cela signifie de tenir compte des quatre éléments au cœur de toute fonction : les compétences, les processus, les outils et la gouvernance. La réflexion sur ces éléments doit être faite pour chacune des fonctions, mais également pour les fonctions prises dans leur ensemble. Cette vue collective est particulièrement importante sur le plan de la gouvernance, car bon nombre d’activités, d’indicateurs clés de rendement et de normes sont les mêmes pour toutes les fonctions.
  4. Mesurer le rendement. Pour être efficaces, les fonctions doivent être mesurables. En fait, s’il est possible de mesurer facilement le rendement d’une fonction, c’est un bon indice qu’elle a été conçue adéquatement. À titre d’exemple, une mesure de rendement des fonctions mobiles pourrait être exprimée en « pourcentage des opérations de terrain pris en charge par des solutions SIG mobiles ».
  5. Constamment améliorer la fonction. La création d’une fonction n’est jamais terminée. Elle demande une surveillance constante et un perfectionnement de la combinaison des compétences, des techniques, des processus et de la gouvernance. Au fil de son évolution, une organisation peut nécessiter des compétences supplémentaires, différents indicateurs ou différents outils. L’idée est de toujours faire évoluer votre SIG en l’harmonisant à la stratégie de votre organisation.

Aujourd’hui, les SIG ont un rôle majeur à jouer dans le monde des affaires. À la fois science et plateforme permettant d’extraire des renseignements complexes dans le contexte courant de la géographie, le SIG se trouve au cœur de la révolution numérique. Pour développer leur plein potentiel, les organisations doivent adopter des mesures concrètes et bâtir leur fonction SIG.

Ce billet a été écrit en anglais par Matthew Lewin et peut être consulté ici.