Cartographier le changement urbain : détecter les changements dans l’environnement bâti avec ArcGIS
Le changement est constant – les villes se développent, les paysages se transforment et les infrastructures évoluent. Comprendre ces changements est essentiel pour assurer un aménagement urbain à la fois intelligent et durable. Dans ce billet, je présente deux flux de travaux d’imagerie pratiques dans ArcGIS Pro permettant de déceler les changements dans l’environnement bâti, en détectant les nouveaux développements et la perte de bâtiments au fil du temps.
La détection des changements consiste à établir les différences dans un lieu ou un paysage en comparant des données collectées à des moments différents pour répondre à des questions telles que : Qu’est-ce qui a changé? Où? Quand? Dans quelle mesure? Détecter les changements dans l’environnement bâti urbain signifie définir comment les structures d’origine humaine, telles que les bâtiments, les terrains vagues, les routes et autres infrastructures, s’étendent, rétrécissent ou se transforment au fil du temps. Contrairement à la végétation ou aux paysages naturels, les entités bâties présentent des configurations spatiales et spectrales distinctes qui permettent de cartographier et de surveiller les zones non bâties environnantes. Il est important de comprendre ces changements, car l’environnement bâti influence directement la façon dont les gens vivent, se déplacent et interagissent avec leur ville.
Dans ce billet, j’aborde deux flux de travaux d’imagerie ArcGIS qui permettent de détecter les changements dans l’environnement bâti. L’analyse s’appuie sur l’imagerie PlanetScope pour fournir huit bandes spectrales à une résolution d’environ 4,7 mètres. Pour la démonstration, je compare des images de juin 2023 et de juin 2024 de la ville de Gatineau au Canada, vue de dessus. À la fin du billet, vous comprendrez mieux les principaux outils disponibles dans ArcGIS pour la détection des changements dans l’environnement bâti. Vous saurez aussi comment choisir la bonne méthode pour votre projet, en fonction de vos objectifs et de l’imagerie avec laquelle vous travaillez.
Détection des changements basée sur les pixels
La détection des changements basée sur les pixels compare les valeurs des pixels entre deux ensembles de données matricielles pour mettre en évidence les changements au fil du temps. Dans le contexte de l’environnement bâti, cette méthode est particulièrement utile pour détecter les endroits où sont bâties de nouvelles constructions ou les endroits où des zones bâties ont été retirées. Elle est centrée sur l’ampleur et l’orientation des différences de valeur des pixels entre deux dates plutôt que sur la classification préalable de l’occupation des sols. Voici comment appliquer la méthode de détection des changements de l’environnement bâti basée sur les pixels dans ArcGIS Pro :
Étape 1 : Calculer le NDBI pour chaque image
L’indice de construction normalisé (NDBI) met l’accent sur les entités urbaines en comparant la réflectance des surfaces bâties dans les bandes du proche infrarouge (NIR) et de l’infrarouge de courte longueur d’onde (IRCL) :
Comme l’imagerie PlanetScope ne comprend pas de véritable bande IRCL, nous avons approximé le NDBI en utilisant la bande 4 (rouge) et la bande 8 (NIR). Cet indice basé sur un ratio permet de minimiser les effets des conditions atmosphériques et des différences d’éclairement. Suivez les étapes ci-dessous et calculez le NDBI pour les deux images :
Calcul du NDBI pour l’image de la période 1 (juin 2023)
Création d’un modèle matriciel monocanal fondé sur le NDBI pour l’image de la période 1 (juin 2023)
Étape 2 : Normaliser les valeurs des pixels
Pour tenir compte des incohérences atmosphériques ou liées aux capteurs, normalisez les valeurs des pixels à l’aide de la fonction de calculatrice de données matricielles. Vous trouverez ci-dessous la formule utilisée pour normaliser les indicateurs NDBI en fonction de la moyenne et de l’écart-type des données matricielles :
Vous pouvez extraire la moyenne et l’écart-type à partir de la symbologie du modèle matriciel :
Récupération des valeurs de la moyenne et de l’écart-type dans le volet de symbologie du modèle matriciel NDBI
Utilisez l’outil et les paramètres suivants pour appliquer ce processus aux images de 2023 et de 2024 afin de garantir la comparabilité :
Utilisation de l’outil de calculatrice de données matricielles pour normaliser les deux modèles matriciels NDBI
Répétez les étapes 1 et 2 pour l’image de la période 2.
Étape 3 : Lancer l’assistant de détection des changements
Il existe différentes façons d’appliquer la détection des changements basée sur les pixels dans ArcGIS Pro. L’assistant de détection des changements en fait partie. Cet outil nécessite l’extension Image Analyst et fonctionne dans une scène cartographique en 2D. À cette étape, suivez la vidéo ci-dessous afin d’appliquer l’assistant de détection des changements au moyen des deux modèles matriciels NDBI normalisés pour les images des périodes 1 et 2 (juin 2023 et juin 2024).
Exécution de l’assistant de détection des changements (méthode basée sur les pixels) à l’aide des deux modèles matriciels NDBI normalisés
À l’étape de classification des différences, ajustez les plages de l’histogramme jusqu’à ce que les classes représentent des seuils de changement significatifs pour vos imageries.
Le modèle matriciel de sortie met en évidence le gain de bâtiments (zones nouvellement développées durant la période 2), la perte de bâtiments (zones où les entités bâties ont disparu durant la période 2) et l’absence de changement (zones stables avec peu ou pas de différence entre les périodes 1 et 2).
Résultat de la détection des changements basée sur les pixels : Image de juin 2023 (à gauche), image de juin 2024 (au milieu) et modèle matriciel de détection des changements (à droite) où les pixels verts indiquent un gain d’environnement bâti, et les pixels rouges, une perte d’environnement bâti.
Détection des changements catégoriels
La détection des changements catégoriels est axée sur l’identification des transitions entre les classes, telles que les types d’occupation des sols, au fil du temps. Contrairement aux méthodes par pixels, qui analysent les valeurs spectrales brutes, les flux de travaux catégoriels classent d’abord l’imagerie en catégories thématiques (par exemple, bâti, vert, eau) avant d’en suivre l’évolution. Ce sont donc des flux particulièrement utiles pour cartographier les dynamiques de l’occupation des sols et produire des résultats faciles à interpréter.
Dans ce flux de travaux, nous classerons chaque image séparément avant de les comparer avec l’assistant de détection des changements d’ArcGIS Pro.
Étape 1 : Effectuer une classification non assistée
Effectuez une classification non assistée sur les deux images brutes en appliquant la classification non supervisée d’agrégats ISO selon les étapes ci-dessous :
Classification non assistée de l’image de la période 1 (juin 2023) à l’aide de l’outil de classification non supervisée d’agrégats ISO
Résultats matriciels de la classification non assistée
Regardez bien et vous verrez que chaque classe s’aligne sur les entités du terrain. Dans cet exemple, voici les entités que représente chaque classe :
- Classe 1 : Plans d’eau
- Classe 2 : Environnement bâti (routes, toits, infrastructures)
- Classes 3 à 5 : Végétation
Comparer le résultat de la classification non assistée avec l’image réelle pour évaluer la façon dont les classes représentent les entités dans le monde réel
À l’étape suivante, suivons cette logique et combinons les classes de végétation en une seule. Ainsi, on simplifie l’ensemble des données en catégories significatives.
Étape 2 : Reclassifier dans les catégories définitives
Appliquez la reclassification aux deux modèles matriciels pour réduire le nombre de classes et obtenir des modèles thématiques plus soignés. Pour ce flux de travaux, effectuons une reclassification en trois catégories : eau, bâti et végétation.
Utilisation de l’outil de reclassification pour regrouper cinq classes en seulement trois
Comparaison du résultat de la reclassification avec l’imagerie réelle pour s’assurer que les nouvelles classes représentent bien les entités dans le monde réel
Répétez les étapes 1 et 2 pour l’image de la période 2.
Étape 3 : Lancer l’assistant de détection des changements
Lancez ensuite l’assistant de détection des changements et sélectionnez l’option de changement catégoriel en suivant les étapes ci-dessous :
Exécution de l’assistant de détection des changements (méthode catégorielle) à l’aide des deux modèles matriciels classifiés
Au cours de l’étape de génération des résultats, vous devrez peut-être ajuster les paramètres de post-traitement en fonction des types d’imageries et des résultats de la classification :
- Voisinage par lissage : permet de réduire le bruit dans les modèles matriciels classés.
- Méthode par remplissage statistique : permet de combler de petites données manquantes afin de produire une carte précise des changements catégoriels.
Le résultat met en évidence les transitions comme l’eau vers le bâti, l’eau vers la végétation, le bâti vers l’eau, etc. Vous disposez maintenant d’une carte des changements catégoriels qui montre bien comment les différentes classes d’occupation des sols ont évolué entre les périodes 1 et 2.
Résultat de la détection des changements catégoriels : Image de juin 2023 (à gauche), image de juin 2024 (au milieu) et modèle matriciel de détection des changements (à droite) où sont indiquées les catégories de transition.
Conseil : Remplacez la classification non assistée de l’étape 1 par une classification assistée si vous disposez de données d’entraînement ou si vous souhaitez avoir un plus grand contrôle sur la définition des classes.
Conclusion
La détection des changements dans l’environnement bâti est essentielle pour comprendre comment les villes se développent, s’adaptent et réagissent à des pressions telles que la croissance démographique, les effets du climat ou les catastrophes. Grâce à l’imagerie et aux puissants outils d’analyse d’ArcGIS Pro, vous pouvez transformer des pixels bruts en renseignements exploitables. Dans ce billet, nous avons exploré deux flux de travaux :
- la détection des changements basée sur les pixels, qui met en évidence les différences spectrales et permet de repérer rapidement les changements subtils;
- la détection des changements catégoriels, qui permet de suivre les transitions entre les classes d’occupation des sols et de produire des cartes thématiques faciles à interpréter.
À chaque approche, ses propres atouts. Choisir la méthode qui vous convient dépend des objectifs de votre projet, du type de données et du public visé. Pour les urbanistes, les gestionnaires d’infrastructures et les chercheurs, ces flux de travaux proposent des méthodes pratiques et évolutives permettant de surveiller le changement et de soutenir une prise de décision éclairée.
Ce billet a été écrit en anglais par Hawjin Falahatkar et peut être consulté ici.