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Le Canada devrait-il se doter d’une stratégie nationale pour ses adresses?

Les adresses municipales sont indispensables à de nombreuses applications essentielles comme le calcul d’itinéraire des véhicules, la livraison de colis, les élections, les recensements, les interventions en cas d’urgence, la fiscalité, les travaux publics, les SIG et une foule d’autres applications. Bien qu’il existe déjà plusieurs bases de données officielles d’adresses au Canada, elles se limitent le plus souvent à des données provinciales et leur format, à cause d’un manque d’uniformité, ne permet pas l’interopérabilité. De plus, la qualité du contenu de ces bases de données est parfois suspecte. Est-il maintenant temps d’élaborer une stratégie nationale des adresses et un dépôt d’adresses pour le Canada?

Les adresses municipales s’avèrent essentielles pour localiser des biens, des bâtiments ou des personnes. Elles nous aident aussi à connaître le lieu de résidence ou le lieu de travail des gens. De nombreux services publics, y compris la livraison du courrier, l’évaluation, la fiscalité, les élections, les services en cas d’urgence et la délivrance des permis de conduire, sont basés sur les adresses municipales. De nombreux services du secteur privé dépendent également de l’exactitude des adresses municipales, comme les services d’hydroélectricité, les ventes immobilières, les services de taxi, la livraison de colis et les services bancaires.

Au Canada, les adresses sont gérées par des administrations municipales. Les municipalités attribuent des noms aux secteurs et aux rues, et des numéros aux bâtiments et aux maisons. Il faut disposer du personnel, des bases de données et des outils appropriés pour assurer une gestion efficace et faire en sorte que le registre d’adresses reste exempt d’erreur et à jour. Certaines administrations municipales, comme Toronto et Vancouver, partagent leurs adresses grâce à des portails de données ouvertes.

L’ensemble de données du dépôt d’adresses de la ville de Toronto fournit une représentation par points de plus de 500 000 adresses. Chaque point représentant une adresse est décrit selon une série d’attributs, y compris le numéro de rue, le nom de rue, le type d’adresse, la classe d’entité et les coordonnées réelles.

Cette image indique la position précise de quelques adresses torontoises par des points rouges. Les attributs détaillés de l’une de ces adresses sont également présentés. Ces données peuvent être téléchargées sous forme de fichier SHP à partir du site des données ouvertes de la ville de Toronto, qui partage actuellement 524 679 points d’adresses.

Cette image indique la position précise de quelques adresses vancouvéroises par des points rouges. Les attributs de l’une de ces adresses sont également présentés dans la fenêtre contextuelle. Ces données peuvent être téléchargées sous forme de fichier SHP à partir du site des données ouvertes de la ville de Vancouver, qui partage actuellement 100 857 points d’adresses.

Cela semble révéler un processus de gestion des adresses bien organisé de la part du Canada. Alors pourquoi avons-nous besoin d’une stratégie nationale pour nos adresses? Il existe de nombreuses raisons d’adopter une stratégie pour les adresses.

Tout d’abord, les bases de données d’adresses ne sont pas toutes accessibles au public. Cela signifie que quiconque a besoin d’une base de données d’adresses doit en créer une. Il en résulte un dédoublement inutile du travail. Les villes de Toronto et de Vancouver, ainsi que quelques autres, ont rendu public leur registre d’adresses sous forme de données ouvertes. Pourquoi la plupart des autres provinces et territoires canadiens ne le font-ils pas?

Ensuite, les bases de données ne sont pas toutes bien conçues ni correctement entretenues, ce qui entraîne une mauvaise qualité des données. Enfin, il n’existe aucun format d’adresse standard pour la collecte et le partage de ces données. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) ayant récemment autorisé l’utilisation du format d’échange de données de localisation municipale (CLDXF) de la National Emergency Number Association (NENA) pour le partage des données d’adresse du système 9-1-1 de prochaine génération, il n’y a jamais eu de meilleur moment pour appliquer ce format commun d’échange à toutes les adresses canadiennes.

Qualité des données d’adresses

La plupart des adresses municipales en Amérique du Nord sont soumises à des règles de contrainte qui doivent être respectées pour optimiser la qualité des données. Par exemple, chaque adresse doit être unique; chaque site doit présenter un point d’accès principal; chaque numéro d’unité doit correspondre à un nombre positif supérieur à un; la parité des numéros d’unité doit être cohérente avec les numéros pairs d’un côté de la rue et les numéros impairs de l’autre côté; et les numéros d’unité doivent augmenter dans une direction le long d’un côté d’îlot. Cependant, il existe des exemptions pour certaines adresses, comme les bâtiments ou les propriétés qui ne se trouvent pas sur une rue (par exemple, les propriétés accessibles uniquement par voie aérienne ou navigable), qu’il faut également gérer.

Puisqu’il y a entre 14 et 17 millions d’adresses au Canada, il n’est pas surprenant que certaines soient erronées. Même si 95 % des adresses sont parfaitement correctes, il reste tout de même près d’un million de cas douteux qui présentent des problèmes comme une adresse manquante ou en double, un numéro de bâtiment incorrect, un bâtiment qui n’existe plus, une mauvaise rue, des fautes d’orthographe, des problèmes d’accents ou de caractères spéciaux, et une foule d’autres inexactitudes potentielles.

De plus, les provinces ont tendance à imposer leurs propres spécifications par rapport aux adresses. Certaines organisations fédérales suivent également leurs propres lignes directrices concernant les bases de données d’adresses. Par exemple, la Société canadienne des postes respecte certaines spécifications pour les adresses postales. La communauté des interventions en cas d’urgence suit également certaines normes pour ses bases de données d’adresses, et elle adoptera sous peu le format CLDXF de la NENA. Puisque les organisations ont des exigences variées en matière d’adresses, beaucoup de bases de données d’adresses utilisent des normes différentes.

Géocodage

Si l’adresse en soi est importante, son utilité réside dans sa mise en correspondance avec un emplacement géographique unique. L’emplacement géographique de l’adresse, appelé géocode, facilite la recherche et l’affichage de l’emplacement de la propriété ou du bâtiment sur une carte. Le géocode associé à chaque adresse peut également être erroné (en d’autres termes, l’emplacement géographique est incorrect) même si l’adresse elle-même est syntaxiquement et sémantiquement correcte.

Par exemple, voici l’adresse municipale de l’édifice qui se trouve à la célèbre intersection des rues Portage et Main, au 375, rue Main, Winnipeg (Manitoba). La position du bâtiment s’affiche sur la carte parce que l’adresse comporte un champ de géocodage (la latitude et la longitude du bâtiment sont comprises comme attribut de l’adresse).

Les adresses postales, comme les numéros de case postale ou les numéros de route rurale, ne constituent pas des adresses municipales. Bien que les codes postaux puissent s’avérer utiles pour localiser les adresses, ils ne font pas officiellement partie de l’adresse municipale. Les codes postaux font partie de l’adresse postale et sont considérés comme des identificateurs de zone géographique : on peut s’assurer que le géocode d’une adresse se trouve bien à l’intérieur des limites du code postal qui lui est associé.

La localisation d’un géocode complique la gestion efficace des adresses. Dans le cas d’une adresse de propriété, l’emplacement du géocode correspond souvent au centroïde de la propriété, mais parfois l’entrée de la propriété est utilisée. Dans le cas d’une adresse de bâtiment, l’emplacement du géocode peut correspondre au centroïde du bâtiment ou à l’entrée du bâtiment.

L’image ci-dessus illustre les différences relatives à la localisation de bâtiments et de parcelles. Sont affichés : les emplacements des centroïdes des parcelles (en rouge), les emplacements des centroïdes des bâtiments (en vert), les emplacements des entrées des bâtiments (en bleu) et les emplacements des entrées des propriétés (en violet). Non seulement il y a une distance importante entre ces points, qui ne se trouvent pas près du centroïde pour de grandes propriétés, mais même pour de petits lots urbains, les points d’emplacement peuvent se trouver à une distance considérable les uns des autres.

Compte tenu du genre de problèmes qui peuvent survenir, la gestion des adresses peut s’avérer complexe et demander beaucoup de ressources. Si plusieurs organisations gèrent des adresses de bâtiments et de propriétés dans un même emplacement géographique, cela représente un énorme gaspillage de ressources. Ce temps et ces efforts en double pourraient être utilisés pour améliorer la qualité et l’actualité des données si les organisations recueillaient, partageaient et utilisaient les mêmes données relatives aux adresses.

Le système 9-1-1 de prochaine génération a imposé l’utilisation d’une norme commune de partage des adresses au Canada d’ici 2020. Est-il temps que les autres membres de la communauté de gestion des adresses adoptent aussi cette nouvelle norme et rendent leurs données accessibles? Peut-être que la communauté géospatiale canadienne devrait commencer à travailler à l’élaboration d’une stratégie nationale relative aux adresses, en visant la création un registre d’adresses national commun.

Ce billet a été écrit en anglais par Gordon Plunkett et peut être consulté ici.