Bulletin The Geospatial Edge : Numéro 12, Hiver 2025
Le bulletin The Geospatial Edge est publié par Esri Canada à l'intention des gestionnaires et des professionnels chargés de développer les capacités géospatiales de leur organisation. Dans ce numéro, Matt Lewin présente sept compétences essentielles pour les gestionnaires SIG qui se distinguent dans le domaine géospatial.
Ayant passé de nombreuses années à conseiller des gestionnaires de SIG dans divers secteurs, j’ai acquis des connaissances précieuses sur les défis uniques qu’ils rencontrent et sur les attributs qui distinguent les leaders qui réussissent dans ce domaine.
Les gestionnaires de SIG ont des responsabilités qui vont bien au-delà de la simple supervision d’éléments technologiques; ils sont essentiels pour influencer la manière dont les organisations exploitent les données géospatiales afin d’améliorer la prise de décision et de favoriser l’innovation. Les gestionnaires de SIG les plus accomplis naviguent dans des dynamiques d’équipe complexes et alignent les initiatives SIG sur des objectifs commerciaux globaux. Leurs compétences vont bien au-delà des aspects techniques des logiciels.
Récemment, on m’a demandé quelles étaient les compétences particulières que j’estimais cruciales pour qu’un gestionnaire de SIG puisse exceller. Il ne s’agit pas de capacités de gestion générales, mais de compétences propres aux gestionnaires de SIG et primordiales afin d’exceller à ce poste.
Le leadership? L’influence politique? La pensée stratégique? Bien sûr, toutes ces compétences sont essentielles pour être gestionnaire. Toutefois, sont-elles propres au métier de gestionnaire de SIG? Non.
Je veux aborder les compétences spécifiques.
Dans cette optique et après réflexion, voici sept compétences distinctives que, selon moi, toute personne doit absolument posséder pour s’épanouir en tant que gestionnaire de SIG.
Première compétence : comprendre les capacités des SIG modernes
Les gestionnaires de SIG doivent rester au fait des possibilités qu’offrent les SIG modernes. Les plateformes SIG d’aujourd’hui sont incroyablement polyvalentes. Elles s’appuient sur les logiciels de gestion des données spatiales et de cartographie existants et intègrent des fonctionnalités modernes telles que les flux de données en direct, l’automatisation des flux de travaux et l’intelligence artificielle pour l’analyse prédictive. Elles fournissent également des informations spatiales sur toutes sortes d’appareils mobiles et sur le web. Si vous ne connaissez pas ces capacités, vous risquez de rater l’occasion d’aider votre organisation à résoudre des problèmes et à atteindre ses objectifs.
Imaginez que vous êtes gestionnaire de SIG au sein du service d’aménagement urbain d’une ville de taille moyenne. Un membre de votre équipe vous soumet l’idée d’utiliser les SIG pour surveiller les tendances de circulation en temps réel et prévoir les embouteillages aux heures de pointe. Génial, n’est-ce pas? Cependant, il y a un hic : vous considérez toujours les SIG comme des outils permettant d’établir des cartes de zonage, et non comme des systèmes dynamiques capables d’intégrer des flux de données en temps réel. Vous rejetez cette idée en pensant que sa concrétisation est trop compliquée ou trop dispendieuse
Un mois plus tard, vous apprenez qu’une ville voisine a mis en œuvre cette même solution et qu’elle est aujourd’hui louangée pour avoir réduit les temps de trajet. Entre-temps, votre ville est confrontée à des plaintes concernant des goulets d’étranglement.
En comprenant les possibilités offertes par les SIG modernes, vous pouvez amener votre équipe à innover et à relever les défis de façon proactive au lieu d’être à la traîne. En outre, le fait de rester informé vous permet d’être prêt à répondre aux décideurs qui se demandent si les SIG peuvent les aider à résoudre certaines situations. Au lieu de chercher maladroitement une réponse, vous pourrez leur dire en toute confiance : « Oui, et voici comment. »
Deuxième compétence : articuler la proposition de valeur des SIG
En vue d’obtenir l’adhésion et le soutien des décideurs par rapport aux initiatives SIG, le gestionnaire de SIG doit être en mesure d’articuler clairement la valeur de ces initiatives. Il s’agit d’expliquer avec précision comment les SIG et l’approche géographique contribuent de manière unique aux objectifs de votre organisation. En tant que gestionnaire de SIG, vous savez pertinemment que les SIG sont très précieux. Néanmoins, votre message se perdra si vous ne parvenez pas à expliquer clairement leur impact dans des termes qui trouvent écho auprès des décideurs. Les chefs de file ne s’intéressent pas au jargon géospatial : ils s’intéressent aux résultats.
Supposons que vous êtes gestionnaire de SIG dans une entreprise de services publics et que votre équipe vient de mettre au point un outil qui utilise les SIG pour prédire les pannes d’équipement. Cette technologie de pointe permettrait à l’entreprise d’économiser des centaines de milliers de dollars en réparations et en temps d’arrêt. Enthousiaste à l’idée d’en faire part à vos supérieurs, vous présentez cet outil dans le cadre d’une réunion. Vous commencez alors à parler de modélisation spatiale, d’algorithmes prédictifs et de couches de données.
Au bout d’un quart d’heure, vous remarquez que le directeur financier consulte son téléphone et que le directeur de l’exploitation a l’air perplexe. Quelqu’un vous interrompt alors : « Cela semble intéressant, mais… en quoi cela peut-il nous aider à atteindre nos objectifs? »
Cette question vous fige net. Vous savez à quel point cet outil est hors pair, mais vous ne l’avez pas mis en valeur de sorte qu’il corresponde aux priorités de votre auditoire.
Voici la leçon à tirer : en tant que gestionnaire de SIG, vous devez combler le fossé entre les capacités techniques et la valeur commerciale. Les cadres ne veulent pas savoir comment la magie opère; ils veulent savoir pourquoi c’est important. Au lieu de vous concentrer sur les détails techniques, vous auriez pu dire :
« Grâce aux SIG, nous pouvons prévoir quels actifs risquent de tomber en panne, ce qui nous permettrait de planifier les entretiens de manière proactive. Ainsi, nous réduirions de 30 % les coûts des réparations d’urgence et nous minimiserions les interruptions de service. C’est un résultat gagnant-gagnant pour le budget et notre réputation. »
Là, vous auriez leur attention. Vous auriez articulé la proposition de valeur des SIG.
Troisième compétence : gérer le coût total des SIG
Le coût des SIG va au-delà du logiciel en soi; il englobe le matériel, les licences, l’acquisition de données, la formation du personnel et l’entretien continu.
Il ne faut pas oublier que cet aspect n’est pas exclusif aux SIG. Tous les systèmes d’information ont de multiples éléments qui constituent leur coût total (ou coût total de possession). Or, les gestionnaires de SIG sont censés être les mieux placés pour connaître les coûts liés aux SIG et aux services géospatiaux connexes, ce qui n’est pas une mince affaire si l’on considère l’étendue des capacités et des points d’intégration des SIG modernes.
Voici des questions clés à se poser : avons-nous estimé avec précision le nombre d’utilisateurs qui auront besoin d’un accès et à quel niveau afin d’éviter des frais de licence inattendus? Disposons-nous d’une infrastructure suffisante pour soutenir les charges de travail consommant une grande part des ressources de l’unité centrale? Qu’en est-il de la formation du personnel? Notre personnel est-il suffisamment formé pour exploiter et soutenir notre portefeuille de géosolutions? Voilà des exemples de dépenses supplémentaires, sans parler des frais d’entretien annuels et des coûts de résolution de problèmes.
Si vous ne tenez pas compte de ces facteurs, vous risquez de dépasser votre budget et de perdre votre crédibilité auprès de la direction. Toutefois, si vous faites vos devoirs en posant des questions difficiles, en planifiant les besoins futurs et en calculant les coûts totaux sur le cycle de vie du système, vous éviterez non seulement les mauvaises surprises, mais vous présenterez aussi des arguments solides en faveur des investissements en matière de SIG.
Contrôler un budget ne se résume pas à comprendre et à gérer les coûts; il faut aussi faire preuve de pensée stratégique, savoir comment faire fonctionner les SIG et faire en sorte que l’investissement en vaille la peine.
Quatrième compétence : comprendre comment les SIG s’intègrent à d’autres systèmes
Les SIG n’existent pas de manière isolée; du moins, ils ne devraient pas l’être.
Dans la plupart des organisations, les systèmes et les outils SIG s’intègrent dans un écosystème plus vaste de systèmes d’entreprise tels que les plateformes de planification des ressources organisationnelles (PRO), de gestion de la relation client (CRM) et de gestion des actifs. Cet écosystème concerne également le monde des systèmes d’interopérabilité et d’analyse des données comme Microsoft Power BI et Google BigQuery. Ces systèmes prennent collectivement en charge les flux de travaux qui couvrent plusieurs services ou secteurs d’activité. Il est crucial qu’un gestionnaire de SIG connaisse bien ces systèmes et les principaux points d’intégration des SIG afin de garantir la prise en charge des processus de bout en bout et d’éviter l’inefficacité résultant de systèmes et de données cloisonnés.
Imaginez que vous avez développé une application SIG pour le programme d’intervention d’urgence d’une municipalité, mais que cette application n’est pas intégrée au système de répartition. Votre application peut très bien cartographier les fermetures de routes, les zones d’évacuation et les emplacements des abris : tout ce dont les premiers répondants peuvent avoir besoin lors d’une catastrophe. Or, lorsque les premiers répondants tentent d’utiliser le système en pleine tempête, vous risquez de créer involontairement le chaos, car les répartiteurs perdent beaucoup de temps à copier manuellement les mises à jour d’un système à l’autre. Quand le temps presse, ce manque de convivialité peut s’avérer coûteux.
En tant que gestionnaire de SIG, il ne suffit pas de connaître les SIG, il faut aussi comprendre comment ils s’articulent avec les outils sur lesquels s’appuie déjà votre organisation. C’est ainsi que vous vous assurez qu’un SIG n’est pas un simple outil isolé, mais un élément essentiel à la réussite de votre organisation.
Cinquième compétence : mettre en place une équipe SIG
Le succès d’un programme SIG dépend de la mise en place d’une équipe adéquate. Un gestionnaire de SIG doit comprendre les différents rôles impliqués et les voies à suivre pour développer les compétences uniques nécessaires.
Imaginez qu’une entreprise décide de confier la constitution d’une équipe SIG à un gestionnaire général n’ayant aucune expérience en la matière. Ce gestionnaire aborde cette tâche comme pour n’importe quel autre service : il embauche quelques personnes compétentes en matière de technologie, leur donne quelques logiciels et attend des résultats. Mais bientôt, des fissures commencent à apparaître.
Le gestionnaire général engage un informaticien pour gérer la base de données SIG, en pensant que tous les types de données s’équivalent. Cependant, cette personne ne comprend pas les structures ou les projections de données spatiales, et les flux de travaux d’analyse critique sont interrompus. Ensuite, le gestionnaire engage un graphiste pour créer des « cartes qui ont de l’allure », mais le graphiste ne comprend pas l’analyse géospatiale ou la manière de tirer des informations pertinentes à partir des données. Enfin, le gestionnaire affecte à l’équipe un analyste de données qui est très doué pour les chiffres, mais qui a du mal à intégrer des données non spatiales dans les flux de travaux SIG.
Le résultat? Une équipe fragmentée d’employés frustrés ayant des compétences mal adaptées et des flux de travaux inefficaces.
Les SIG constituent un domaine unique qui allie la pensée spatiale, l’expertise technique et des connaissances spécifiques. Un gestionnaire de SIG doit comprendre cette complexité et former une équipe capable de la gérer. En bref, un gestionnaire de SIG sait que les SIG ne sont pas des fonctions informatiques ni une discipline analytique comme les autres : c’est un domaine spécialisé ayant ses propres défis et possibilités.
Sixième compétence : gérer et gouverner les données géospatiales
Les SIG reposent sur des données de haute qualité, ce qui fait de la gouvernance des données une responsabilité essentielle pour les gestionnaires SIG. Il s’agit notamment d’établir des politiques en matière d’exactitude, de sécurité et d’accès aux données, ainsi que de conformité par rapport aux normes juridiques et éthiques. Une gouvernance de données efficace garantit que les données SIG restent une ressource fiable et digne de confiance pour prendre des décisions.
Les données géospatiales qui nécessitent une gestion et une surveillance particulières présentent des particularités que n’ont pas les autres types de données. Liées à des systèmes de coordonnées et à des projections, elles proviennent souvent de sources multiples : archives publiques, imagerie satellitaire, capteurs IdO et autres, chacune ayant un niveau de précision et des formats variables, ce qui rend l’intégration plus complexe.
Les données géospatiales sont également très dynamiques. L’utilisation des sols change, les infrastructures évoluent et les flux de données en temps réel fournissent des mises à jour toutes les secondes. La gouvernance des données géospatiales doit tenir compte de l’exactitude temporelle en veillant à ce que les ensembles de données soient à jour et que les versions historiques soient archivées à des fins de comparaison. La gouvernance de données ordinaire se concentre souvent sur les archives statiques et accorde beaucoup moins d’importance à la gestion des éléments temporels.
La gestion de ces données ne se limite pas à leur classement; il faut mettre en place des processus de contrôle des versions, de documentation des métadonnées, d’assurance qualité et d’autorisations d’accès. La gouvernance des données géospatiales consiste à s’assurer que les données SIG sont exactes, cohérentes, sécurisées et correctement gérées. Les gestionnaires de SIG sont les gardiens de l’actif spatial le plus précieux de leur organisation : ses données. Sans bonne gouvernance, les choses peuvent rapidement déraper.
Septième compétence : suivre l’évolution du secteur des SIG
Le secteur des SIG est en constante évolution, influencé par des technologies émergentes telles que l’intelligence artificielle, la réalité augmentée et l’intégration de données en temps réel. Les gestionnaires de SIG doivent se tenir informés de ces tendances et des progrès réalisés par les principaux fournisseurs de technologies dans ce domaine afin d’anticiper les besoins futurs et de guider l’organisation dans l’adoption d’innovations qui améliorent les capacités SIG.
S’ils ne suivent pas ces tendances, ils risquent de prendre des décisions qui isoleront leur organisation dans des technologies ou des flux de travaux désuets. Pire encore, ils risquent de rater l’occasion de résoudre des problèmes de manière innovante, comme s’y attendent désormais les parties prenantes. D’un autre côté, lorsqu’ils restent informés sur le secteur, ils peuvent introduire de manière proactive des solutions qui font de leur organisation un chef de file.
Supposons que vous dirigiez une équipe qui prend très bien en charge les outils et les flux de travaux que vous utilisez depuis des années. Puis, un jour, un autre service se demande s’il peut commencer à utiliser un SIG pour effectuer le suivi en temps réel des équipes sur le terrain ou des analyses prédictives en matière d’entretien des infrastructures. Votre directeur principal de l’information vient également vous voir pour vous demander s’il est possible de transférer vos systèmes sur place vers une plateforme infonuagique afin de bénéficier d’une mise à l’échelle souple et basée sur les services. Votre SIG convient-il à l’infonuagique ou y est-il au moins adapté? Vous tardez à répondre, car ces mots à la mode vous semblent familiers, mais vous n’êtes pas sûr de savoir comment concrétiser cette demande, ni même si elle est réalisable.
Voilà le risque de ne pas suivre attentivement l’évolution du secteur des SIG. Si vous ne suivez pas les tendances, vous risquez d’être pris au dépourvu lorsqu’une personne attend des résultats de votre part. Encore pire, les décideurs pourraient chercher des solutions auprès d’autres équipes que la vôtre, laissant ainsi les SIG à l’écart de projets cruciaux.
Néanmoins, vous aurez toujours une longueur d’avance si vous restez informé. Si une personne vous interroge sur une technologie de pointe, vous pourrez lui dire que vous y travaillez déjà et lui expliquer comment ça pourrait fonctionner. Ainsi, vous ne vous contentez pas de gérer les SIG; vous façonnez la manière dont votre organisation les utilise pour résoudre des problèmes et stimuler l’innovation.
Conclusion
Être gestionnaire de SIG constitue un véritable défi. Ce métier vise à gérer bien plus que de cartes : il faut faire preuve de stratégie, de leadership et faire des SIG un élément essentiel de la réussite de votre organisation. Qu’il s’agisse de comprendre les dernières fonctionnalités des SIG et de communiquer leur valeur, de gérer des coûts, de constituer la bonne équipe ou de rester à l’avant-garde des tendances du secteur, ce poste exige un mélange unique de savoir-faire technique et de vision d’ensemble.
L’essentiel est que la maîtrise de ces compétences n’est pas seulement bénéfique pour l’organisation, elle l’est aussi pour vous! Lorsque vous dirigez un programme SIG qui résout des problèmes réels, qui fait économiser de l’argent et qui stimule l’innovation, vous n’êtes pas seulement un gestionnaire, vous êtes un leader. Dans un domaine qui évolue aussi rapidement que celui des SIG, c’est exactement ce dont chaque organisation a besoin.
Parlons-en ensemble
Êtes-vous gestionnaire de SIG ou dirigez-vous un service géospatial? Ces questions trouvent-elles un écho chez vous? Avez-vous besoin d’aide? Envoyez-moi un courriel ou communiquez avec moi sur LinkedIn. J’aimerais avoir de vos nouvelles!
Cordialement,
The Geospatial Edge est un bulletin d’information périodique sur la stratégie géospatiale et l’intelligence de localisation édité par Matt-Lewin, directeur des services-conseils stratégiques d’Esri-Canada. Ce billet de blogue est une copie du numéro envoyé aux abonnés en février 2025. Si vous souhaitez recevoir The Geospatial Edge et les messages connexes d'Esri Canada directement dans votre boîte de réception, visitez notre centre de préférences en matière de communications et cochez la case « Stratégie SIG » parmi les champs d’intérêt.-
Ce billet a été écrit en anglais par Matthew Lewin et peut être consulté ici.