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Six archétypes de stratégies géospatiales

Afin d’être efficace, une stratégie géospatiale doit avant tout être bien harmonisée avec les besoins de l’entreprise. Bien qu’il n’existe pas de formule simple pour assurer une bonne harmonisation, les responsables peuvent tirer de précieux renseignements de l’étude des archétypes de stratégies géospatiales, qui tiennent compte de divers besoins commerciaux.

Un archétype est tout simplement un modèle récurrent. De nombreuses disciplines les utilisent, de la littérature à la psychologie, en passant par la programmation informatique. Il s’agit de modèles communs qui ont tendance à se répéter. Dans le cas d’une stratégie géospatiale, un archétype fait référence à une combinaison simple de personnes, de processus et de technologies que les organisations mettent couramment en œuvre pour atteindre des objectifs commerciaux précis. J’ai défini six combinaisons et les ai disposées dans un modèle d’archétype simple.

Dans ce modèle, trois motivations commerciales courantes chez nos clients (efficacité, productivité et croissance) forment une matrice avec deux grands niveaux de maturité géospatiale (faible et élevée).

Le modèle est fondé sur deux facteurs importants qui servent de base à toute stratégie géospatiale : la motivation commerciale et la maturité géospatiale.

Par « motivation commerciale », on entend l’orientation et les priorités générales d’une organisation. Il s’agit de déterminer où et sur quoi l’organisation concentre ses efforts. En général, les entreprises ont l’un des trois volets suivants : améliorer leur efficacité (éliminer le superflu et le gaspillage), accroître la productivité (travailler plus rapidement, mieux et à moindre coût) ou croître (développer les produits, les services et les marchés). De nombreuses entreprises prétendront poursuivre ces trois objectifs en même temps. Cependant, d’après mon expérience (du moins, d’un point de vue général), la haute direction accorde presque toujours la priorité à l’un de ces trois objectifs.

L’autre volet important d’une stratégie géospatiale est le degré actuel de maturité géospatiale. Il s’agit du degré de compétence générale qu’une organisation possède dans le domaine géospatial. Les organisations avec peu de maturité géospatiale n’ont pas l’expertise, les outils ou les processus nécessaires pour offrir des capacités géospatiales poussées. De leur côté, les entreprises avec un grand niveau de maturité comptent sur des mécanismes géospatiaux bien huilés. Elles sont donc capables de soutenir des capacités complexes et de grande valeur.

Le croisement entre la motivation commerciale et la maturité géospatiale génère un ensemble distinct d’archétypes de stratégies géospatiales. Chacun d’entre eux est axé sur un objectif différent, mais ensemble, ils constituent un plan directeur de mise en œuvre. Voyez-les comme un point de départ utile pour élaborer une stratégie détaillée et personnalisée. C’est un peu comme construire une maison : il est plus facile de commencer avec un ensemble de plans d’étage préconfigurés et d’ensuite les modifier que de partir de zéro et de prendre les innombrables décisions de conception nécessaires dans le cadre de la construction d’une demeure. Les six archétypes sont des lignes directrices qui vous aideront à bien orienter vos efforts d’élaboration de stratégie, et ce, dès le début.

Stratégies axées sur l’efficacité

Les stratégies axées sur l’efficacité conviennent aux organisations qui souhaitent réduire ou rationaliser leur empreinte opérationnelle. Souvent, ces organisations sont confrontées à des difficultés internes ou à un ralentissement dans leur secteur. Elles doivent alors réduire les dépenses superflues pour rester sur la bonne voie. Parmi les tactiques courantes, on retrouve les initiatives de réduction des coûts, les programmes de gestion allégée et les restructurations.

1. Automatiser les flux de travaux géospatiaux

Dans l’archétype 1, une organisation avec un bon degré de maturité géospatiale considère ses futures capacités géospatiales comme une source d’efficacité. Cette stratégie convient aux entreprises prêtes à fonctionner dans un environnement allégé, soit en mettant en œuvre des solutions d’automatisation des activités, soit en modifiant l’orientation de celles existantes. En d’autres mots, elles doivent automatiser ou rationaliser leurs flux de travaux aux points critiques du cycle de vie de l’information, notamment la saisie des données, l’analyse spatiale et la production de cartes. L’objectif est de réduire les interventions manuelles (donc les coûts) nécessaires pour effectuer ces tâches. En plus de recourir à la technologie, les organisations doivent rationaliser les processus associés au soutien des flux de travaux, à la gestion des données, à la gestion des applications et à la dotation en personnel, tout en respectant les exigences de l’approche géospatiale allégée.

Par exemple, les organisations pétrolières et gazières avec un bon degré de maturité géospatiale appliquent souvent cette stratégie. En raison de leur secteur volatil, elles doivent alléger leurs processus afin de surmonter les chutes du prix du pétrole. Ces organisations ont rapidement adopté des solutions qui réduisent les coûts et les efforts associés à la surveillance des installations pétrolières, comme l’utilisation de drones.

Tactiques clés

  • Technologie – Privilégier les solutions d’automatisation aux points critiques du cycle de vie de l’information géospatiale pour tous les secteurs d’activité; rationaliser ou réorganiser les environnements de données et d’infrastructure afin de soutenir l’automatisation
  • Personnes – Réduire le nombre de rôles non essentiels; embaucher ou cultiver des talents afin de soutenir le nouvel environnement de solution; mettre en place un ou plusieurs rôles d’analyste de processus d’affaires allégés pour cerner les occasions d’amélioration de l’efficacité géospatiale
  • Processus – Rationaliser les processus ayant une incidence sur les flux de travaux allégés, tels que la gestion des données et des applications; gérer avec rigueur les dépenses en nouvelles technologies

2. Rationaliser l’empreinte géospatiale

L’archétype 2 s’adresse aux organisations avec un faible degré de maturité aux prises avec des problèmes d’efficacité. En réalité, elles disposent de très peu d’options. Cet archétype vise à minimiser autant que possible l’empreinte géospatiale, tout en conservant les solutions et les services essentiels. Un budget plus serré est synonyme de décisions difficiles, et les coûteux exercices de développement de capacités ont peu de chances d’être approuvés. L’objectif consiste à réduire au maximum les capacités géospatiales, sans compromettre leur viabilité, et à les positionner de manière idéale pour assurer une future croissance lorsque les temps seront meilleurs.

Tactiques clés

  • Technologie – Déployer des solutions simples et standards en matière de cartographie et de gestion des données afin de réduire la complexité des flux de travaux et les besoins en soutien; éliminer les applications qui n’appuient pas des fonctions d’affaires essentielles ou en réduire le nombre; privilégier les logiciels-services (SaaS) pour externaliser les coûts de soutien et de maintenance; rationaliser les applications, les données et l’infrastructure technologique dans le nouvel environnement
  • Personnes – Déterminer les postes internes essentiels; confier les autres fonctions à des fournisseurs externes; faire appel aux services de fournisseurs pour l’orientation et le soutien de la production
  • Processus – Établir un niveau de service et de soutien de référence pour assurer le fonctionnement des solutions existantes; élaborer des flux de travaux géospatiaux précis et reproductibles que les utilisateurs pourront suivre

Stratégies axées sur la productivité

Les stratégies axées sur la productivité conviennent aux organisations qui désirent améliorer leur rendement sans trop modifier leurs budgets et leurs niveaux de ressources. N’oubliez pas que la productivité est différente de l’efficacité. L’efficacité consiste à réduire les intrants de production, tels que les heures de travail et l’effectif. Il s’agit de faire la même chose avec moins. La productivité, quant à elle, consiste à augmenter la production par rapport à la quantité d’efforts fournis, soit de faire plus avec la même chose

En général, les organisations soucieuses de leur productivité ont un modèle opérationnel solide, œuvrent dans un secteur relativement stable et souhaitent s’améliorer. Les améliorations visées sont habituellement progressives, et non des changements transformationnels majeurs. Parmi les investissements courants, on retrouve les solutions de productivité du personnel, les initiatives de refonte des processus et la mise à niveau des infrastructures technologiques.

3. Élargir la portée des solutions géospatiales

L’archétype 3 vise à élargir la gamme et la portée des solutions de productivité géospatiale dans l’ensemble de l’entreprise. Pour y arriver, il faut étoffer l’éventail de solutions sur le terrain, dans les bureaux et de liaison ainsi que les offrir à un plus grand nombre d’utilisateurs, en particulier dans les secteurs où l’empreinte géospatiale est faible ou inexistante. Les solutions de productivité varient considérablement d’un secteur à l’autre. Toutefois, tout ce qui peut aider les employés à travailler plus rapidement ou à améliorer la qualité de leur travail est considéré comme une solution de productivité. La plupart des organisations matures disposent déjà de plusieurs solutions de ce type, comme des outils de collecte de données sur le terrain. Elles doivent donc ajouter des solutions de productivité encore plus poussées à celles déjà en place. Il peut s’agir de solutions d’analyse spatiale avancées, telles que des applications de classification d’images fondées sur l’intelligence artificielle. Comme pour les stratégies axées sur l’efficacité, il est essentiel de s’assurer que les capacités et le savoir-faire de l’organisation sont suffisants pour mettre en œuvre et soutenir ces solutions.

Tactiques clés

  • Technologie – Mettre en œuvre des solutions axées sur la productivité qui couvrent les flux de travaux sur le terrain, dans les bureaux et de liaison; se concentrer sur les secteurs avec une grande importance stratégique ou sur ceux ayant une faible empreinte géospatiale
  • Personnes – Promouvoir la notion d’espace auprès des secteurs d’activité peu informés afin qu’ils puissent comprendre et contribuer à cerner les occasions d’amélioration de la productivité dans le domaine spatial; offrir une formation et du perfectionnement sur les nouvelles solutions de productivité
  • Processus – Repenser les flux de travaux et les intégrer afin de tirer parti des nouvelles solutions de productivité

4. Faire évoluer les capacités géospatiales de manière sélective

Dans l’archétype 4, une organisation peu mature s’efforce d’améliorer ses capacités géospatiales afin d’être en mesure, avec le temps, de soutenir un plus large éventail de solutions de productivité. Contrairement à un objectif d’accroissement de l’efficacité, l’augmentation de la productivité se traduit souvent à long terme par des occasions de développement des capacités. Avec cette stratégie, on investit dans la mise en place des bases d’une solide fonction géospatiale d’entreprise, notamment en mettant en place une plateforme de technologie géospatiale commune, en y faisant migrer les technologies existantes ainsi qu’en mettant en œuvre un certain nombre de solutions de grande valeur et à faible risque. Cette stratégie nécessite également la rationalisation de la fonction géospatiale afin de mieux harmoniser les processus de soutien et de gouvernance avec la fonction informatique.

Par exemple, une entreprise agricole nord-américaine a adopté une stratégie similaire pour soutenir son initiative d’exploitation localisée. L’organisation, dont la maturité géospatiale était plutôt faible, a choisi de consolider son modèle de soutien géospatial et d’élargir la portée de sa plateforme de SIG d’entreprise afin d’atteindre son objectif d’augmentation de la productivité. Elle a également mis en œuvre une gamme de solutions à déploiement rapide qui ont favorisé l’optimisation du rendement des cultures.

Tactiques clés

  • Technologie – Mettre en place une plateforme géospatiale d’entreprise commune; faire migrer les solutions vers la plateforme, en particulier les solutions cartographiques existantes redondantes; privilégier un ensemble de solutions de productivité à haute valeur et à faible risque pour favoriser un déploiement rapide sur la nouvelle plateforme 
  • Personnes – Mettre en place un complément de main-d’œuvre au niveau de l’entreprise, comme un gestionnaire, un concepteur d’architectures, un développeur et un analyste d’affaires dans le domaine géospatial
  • Processus – Aligner les processus d’assistance et de gouvernance dans le domaine géospatial sur une fonction informatique comparable pour éviter de créer un silo géospatial

Adopter des stratégies axées sur la croissance

Les stratégies axées sur la croissance conviennent aux organisations qui cherchent à étendre leurs activités au-delà des frontières traditionnelles. Ces organisations recherchent la croissance sous toutes ses formes : élargissement de la clientèle, développement de l’offre de produits ou de services, nouveaux marchés géographiques ou secteurs d’activité inédits. L’accent est mis sur l’innovation, la transformation numérique, l’expansion géographique et les nouvelles affaires.

5. Accélérer l’innovation géospatiale

L’archétype cinq est la stratégie la plus ambitieuse. Il s’agit d’investir dans des innovations géospatiales qui contribuent à la création de toutes nouvelles occasions commerciales. Cette stratégie convient aux organisations matures qui décèlent un rôle unique que la technologie géospatiale peut jouer en périphérie de leurs activités. Ce type de stratégie exige un engagement en faveur de l’innovation, qui se traduit souvent par des ressources dédiées à l’avancement de la recherche et à la découverte de nouvelles possibilités de solutions. Il est peu probable que la mise en œuvre d’une technologie prête à l’emploi ait une réelle incidence dans le cadre de cette stratégie. L’accent est mis sur l’utilisation inédite de l’analyse géospatiale pour faire face aux défis commerciaux actuels ou futurs. Lorsqu’elle est menée à bien, une stratégie d’innovation peut devenir une source stimulante d’avantages durables.

Tactiques clés

  • Technologie – Rechercher et cibler des capacités et des occasions commerciales stratégiques; développer des offres de solutions qui stimulent la croissance dans des secteurs clés ou créent des avantages durables à l’échelle de l’entreprise; se concentrer sur les meilleures pratiques en matière de technologie et de données qui favorisent l’innovation et la collaboration, notamment l’infrastructure informatique élastique, les outils de déploiement rapide d’applications ainsi que le partage des données ouvertes et l’accès à ces dernières
  • Personnes – Attirer ou cultiver des talents formés à l’analyse avancée de la science spatiale et de la science des données; établir des partenariats avec des partenaires d’innovation et des établissements d’enseignement supérieur 
  • Processus – Promouvoir une vaste intégration de la notion d’espace grâce à des initiatives visant à créer une conscience géospatiale, à favoriser la collaboration entre les services et le public et à susciter une culture de l’innovation et de l’exploration

6. Faire croître activement les capacités géospatiales

Si l’archétype cinq est le plus ambitieux, alors l’archétype six est le plus révolutionnaire. Les organisations axées sur la croissance ont besoin de toute l’aide possible. Si le statu quo est une faible maturité géospatiale, une stratégie prudente consiste à augmenter activement les capacités géospatiales pour suivre le rythme de l’entreprise. C’est le moment de prendre des mesures audacieuses. Les améliorations progressives seront insuffisantes, et les retards entraîneront la lassitude des entreprises face au manque d’outils et d’assistance. Cette stratégie vise à faire croître rapidement les capacités dans les zones où les besoins sont importants, à s’aligner sur les initiatives de transformation numérique existantes et à accroître l’intégration de la notion d’espace à tous les paliers.

Tactiques clés

  • Technologie – Privilégier les solutions à effet rapide qui s’alignent sur les initiatives de transformation numérique existantes ou sur les possibilités de croissance ciblées par l’entreprise; orienter le financement vers les améliorations des technologies et des infrastructures de données qui appuient le déploiement rapide de solutions à effet rapide
  • Personnes – Privilégier l’acquisition et la formation de talents capables de soutenir les solutions à effet rapide; parallèlement, mettre en place une fonction d’innovation chargée d’explorer et de cibler les occasions à forte croissance
  • Processus – Promouvoir les succès à grande échelle; aligner les processus d’assistance sur les pratiques informatiques; établir des processus de gouvernance solides pour soutenir la croissance et la demande attendues de la plateforme géospatiale

N’oubliez pas que les archétypes sont le point de départ d’une stratégie, et non un résultat final. Il se peut qu’aucun archétype ne corresponde parfaitement à votre situation. Cela dit, dans la plupart des cas, ils vous serviront de modèle utile pour vous aider à élaborer votre stratégie géospatiale. En comprenant où se croisent les réalités commerciales et géospatiales, vous pouvez plus facilement élaborer et mettre en œuvre une stratégie géospatiale qui vous convient.

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Ce billet de blogue a été publié (en anglais) à l’origine sur la page de l’auteur sur LinkedIn.

Ce billet a été écrit en anglais par Matthew Lewin et peut être consulté ici.